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Fév
2020
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Histoire n° 37 : Les menus plaisirs

Au temps de l’adolescence, Zélie et ses deux seins passèrent de longues heures à se scruter dans le miroir. Mais, tandis que la jeune fille attendait patiemment l’éclosion, les apprentis-seins, eux, se trouvaient beaux comme ils étaient. Mi-rêveurs, mi-paresseux, ils ne voyaient pas bien ce qu’ils avaient à gagner à prendre du galon, et s’étaient accordé tous deux pour continuer à buller lascivement dans les vertes collines de l’enfance. Devant les supplications répétées de leur maîtresse, ils consentirent tout juste à rejoindre, en quelques années, la première lettre de l’alphabet. Ils culminèrent en un bonnet A qui résonnerait justement comme le son empreint de déception que ferait, c’était certain, le premier garçon qui les verrait : « Ah… ». Pourtant, parfaits étaient leurs galbes miniatures et leurs tétons rosés se dressaient avec une fierté tout inconsciente de ce complexe immérité.

La honte qu’éprouvait Zélie, d’une ampleur bien supérieure aux mignons petits objets de cette gêne, la poussa à les garder cachés à la vue du genre humain plus longtemps que ses amies. Mais cette attente prolongée n’était pas pour déplaire aux deux petits monts de chair tendre… Pudiques et encore hésitants dans leurs impulsions amoureuses, ce n’est que peu après leur dix-huitième année qu’ils entendirent sonner en eux l’appel impérieux d’une caresse étrangère. C’est là que s’accordèrent enfin nos trois protagonistes — chacun ayant pris le loisir de mûrir à son rythme — pour trancher d’un seul coup les derniers liens les maillant dans l’inhibition. Ne sous-estimons jamais la brûlante assurance soulevée par le dégel du premier désir ! Ils se donnèrent tous trois aux mains gentilles d’un amateur de petits œufs au plat. Un jeune esthète averti, dont les goûts affirmés pour les menus plaisirs étaient bien plus répandus qu’on ne peut croire.

Aude Berlioz

Histoire disponible à la vente :

  • Original
  • Reproductions
  • Carte Postale

Original cadre en coin 2 x 15 x 20, calligraphié à l’encre de chine par l’auteure : 210 euros.

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