19
Mar
2021
13

Histoire n°34 : Le Tracé du vent

Le vent, la nuit, se réveille doucement, il s’échauffe. Se détache du sol délicatement comme en suivant le tracé d’un serpent. Fait tressaillir les feuilles. Il enfle, s’envole, se gonfle des soupirs de chaque homme puis s’élance. Il décolle d’un tremplin imaginaire.

Tu crois qu’il joue avec tes cheveux, mais ce n’est qu’effet papillon : il slalome entre les étoiles. Fait un rond autour de la Lune et va se mettre à l’abri dans un sapin. Il joue un peu, s’égare. Passe par une cheminée et fait claquer les portes. Se sépare, se multiplie, tourbillonne sous les ponts et s’engouffre dans les tunnels.

En te frôlant, il te donne froid et fait naitre de minuscules montagnes sur ta peau. Mais il s’ennuie des villes, s’enfuit, court voir les neiges éternelles et leur solitude incertaine. Constate. Puis se love, déçu, dans la chemise d’un glacier où il rêve maintenant de chaleur.

Exaspéré par son état vaporeux, il se relève, bouillonne, part en cavale sur une île lointaine. Embrase un incendie des jours entiers et lève toutes les mers pour l’éteindre. Au soleil, enfin, il se calme. Te retrouve. Caresse ton visage d’un souffle léger et va prendre, dans le creux de ta joue, quelques vacances… entre deux grains de beauté. 

Aude Berlioz